dimanche 2 janvier 2011

Itinéraires corses/Bussaglia

Sur cette grève légèrement inclinée, à cent toises environ de la lisière des vagues, venaient mourir les contreforts de rochers énormes qui montaient en s’évasant à une incommensurable hauteur. Quelques-uns, déchirant le rivage de leur arête aiguë, formaient des caps et des promontoires rongés par la dent du ressac. Plus loin, l’œil suivait leur masse nettement profilée sur les fonds brumeux de l’horizon.
C’était un océan véritable, avec le contour capricieux des rivages terrestres, mais désert et d’un aspect effroyablement sauvage.
Chap. XXX Voyage au centre de la Terre, Jules Verne

Redescente vers la plage. L’eau est encore bien fraîche. La mer a trié les morceaux de granite. On aperçoit les traces de son ouvrage, depuis les blocs qui pèsent plusieurs tonnes et sont arrachés aux falaises jusqu’aux granules de cristal. Entre les rocs et la bordure de la plage, tout un ruban d’œufs mouchetés : œufs d’autruche, de cane, de vanneau et d’alouette. Je me suis laissé rouler, de bas en haut et de haut en bas, par le ressac; les galets lisses me massaient le dos avec une énergie tout juste encore supportable.
[…]
Ensuite, ramassé des galets, des ovales aplatis : roses, rouges, brun-rouille, vieil or, verdâtres, bleus, blancs comme de la porcelaine – et chaque variante portant à son tour des inclusions plus sombres et plus claires. Parmi eux, des dessins aux ramifications compliquées, comme dans l’agate moussue. Nous nous amusâmes à les étaler selon divers systèmes - un jeu qui fait saillir plastiquement les différences entre l’appréciation logique et l’estimation esthétique.
Ernst Jünger, Soixante-dix d’efface, Journal 1965-1970, Gallimard.

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