dimanche 2 janvier 2011

Itinéraires corses/Funtanaccia

«- Aleph ? répétai-je.
  - Oui, le lieu où se trouvent, sans se confondre, tous les lieux de l'univers, vus de tous les angles.
    Je ne révélai ma découverte à personne, mais je revins.»
Extrait de L’Aleph de Jorge Luis Borgès.

Celui qui est devant moi, isolé dans un dédale pierreux, a une forme d’une régularité qui frappe l’esprit. Des volumes élémentaires, le cylindre, le cône, qui ont la précision du concept. Pour moi, c’est une sculpture autant qu’une architecture ; une architecture pour l’espace d’un seul homme, une sculpture dans laquelle on peut pénétrer. Cabane issue d’une pratique agricole ancestrale, elle procède aussi, évidemment, de ce lieu du refuge de l’enfance.
Surmontée d’un linteau de genévrier, l’ouverture n’excède pas le mètre. A l’intérieur, une bouche noire, et une sorte de fraîcheur aussi, inattendue. Puis les yeux s’adaptent après ce passage de l’extrême luminosité à cette poche d’obscurité. Le barracun dans lequel je me suis glissé a perdu son faîtage. Du sommet ruiné de la voûte à l’assemblage en faux encorbellement, le faisceau blanc illumine littéralement les arêtes intérieures des pierres. Elles sont recouvertes de suie, trace du charbon de bois produit là ou de feux allumés par les chasseurs, à moins que cette noirceur mate ne date de plus longtemps encore.
C’est une camera obscura. Espérer voir l’image inversée, projetée sur le sol, du mouvement des nuages légers. Ils traversent le ciel, abordent la côte par les falaises où s’achève le piali au dessus de la Méditerranée et suivent la direction indiquée par la vallée de St Julien, poussés vers l’Est par la brise thermique de cette fin de journée.

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